Alcool, famille... - Barksoon, Kirghizistan
Le vent balaye la plaine, nous quittons Barksoon pour parcourir a pied les 8 km qui nous separent du lac Issy Kul. Nous traversons les champs bordes d’arbres. Au loin nous apercevons un cheval, entoure de trois minuscules silouhettes qui nous font de grands signes. Les rencontres sont precieuses, nous sautons sur l’occasion !
Premiere impression de joie, qui se transforme vite en desolation... C’est une famille qui est la, une jolie petite fille habillee a la garconne qui beche meticuleusement la terre, pendant que ses parents se roulent par terre en se tapant sur le ventre, les bouteilles de vodka echouees a terre... Un vieux placide, accompagne de son cheval tout aussi serein, semble etre la par hasard, comme nous en somme...
Ils sont sortis de nulle part, titubant dans l’immensite, jurant dans le silence. Leur fille, silencieuse, se rapproche avec un sourire complice un peu gene, paraissant s’excuser de l’etat de ses parents.
Nous restons 10 min a discuter, et c’est quand nous essayons de prendre conge que la violence eclate. La mere, a peine contenue par son mari, rugit, et ses cris nous poursuivent longtemps encore, portes par le vent. « Dyevushka ! Dyevushka ! Vodka ! Nada vodka! » Nous ne comprenons pas le reste, laissant la cette famille ravagee, au couple ronge par l’alcool, famille dans laquelle les roles semblent inverses....
La vodka fait des ravages au Kirghizistan, de nombreux enfants sont envoyes a l’orphelinat, comme Salavat, que nous rencontrons dans la rue a Bichkek. Elle s’en est sortie, elle vit maintenant chez sa professeur d’anglais (les enfants sont mis a la porte de l’institution a 17 ans), est a l’universite, a toute sorte de projets, apprends l’espagnol apres avoir appris l’anglais, et travaille pour une association qui emmene les orphelins en montagne s’evader de leur quotidien. Mais ils sont nombreux ces enfants qui n’ont pas cette chance ou cette energie, et qui finissent dans la rue, ou « au bazaar ». Ce sujet nous obsede, nous participons a la Journee Nationale de l’Enfant a l’orphelinat de Petrovka avec Alpine Fund, association de Salavat.
Il est difficile d’avoir des informations, l’orphelinat est gere par l’Etat, nous ne savons pas comment les enfants arrivent la... Les enfants recoivent des prix, une exposition de leurs travaux pratiques est organisee, les filles chantent et dansent des tubes russes ou kirghizes. Certains parents sont la, visages marques par la vie... Sans age, une mere se tient debout a l'ecart, sa fille pleurant silencieusement dans son girond, ne desserant pas les bras autour de sa taille. Elle a mis un tailleur par dessus sa blouse de travail, mais ses mains et ses pieds trahissent le dur labeur.
Quel avenir pour ces enfants dans une societe clanique, ou l'on a rien sans famille et relations?
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